À l’époque de
Jésus, tous ceux qui voulaient travailler se ressemblaient de bonne
heure sur la place publique où différents maîtres allaient faire leur
choix pour leur entreprise. Les premiers ouvriers, choisis dès le matin,
étaient naturellement les plus jeunes, de jeunes adultes qui vivaient
peut être encore dans leur famille. Étant jeunes et forts, les maîtres
les engageaient en premier étant assurés qu’ils seraient de bons
travailleurs.
Ceux qui
étaient engagés plus tard dans la journée étaient souvent les plus âgés
dont on doutait de leur capacité à travailler aussi fort que les plus
jeunes. Mais ces travailleurs étaient des pères de famille qui avaient
absolument besoin de travailler pour faire vivre leur épouse et leurs
enfants, les nourrir, les habiller, les loger. Leur besoin était
beaucoup plus grand que les premiers, car des familles comptaient sur
eux.
Finalement,
il y a ceux qui étaient engagés à la fin du jour demeuraient toute la
journée au soleil à attendre d’être choisis (certains d’entre eux
n’étaient même jamais choisis!) Et qui étaient-ils? Eh bien, ceux qui
étaient malades ou handicapés (boiteux, aveugle, sourds, etc.) Ils
étaient seuls au monde et devaient absolument trouver du travail pour
vivre, pour ne pas mourir de faim. Mais on les ignorait, les rejetait ou
on les engageait quelques fois à la dernière minute faute de mieux. Et
pourtant, ce sont eux qui avaient finalement le plus grand besoin de
gagner de l’argent pour vivre.
Jésus nous
enseigne que Dieu ne voit pas d’abord ce qu’on peut faire pour Lui mais
plutôt les besoins les plus pressants de chaque humain. C’est ainsi
qu’il dit que « ce ne sont pas les bien-portants qui ont besoin du
médecin, mais les malades ».
Qu’avons-nous
à envier aux ouvriers de la dernière heure? Qui sont-ils? Ce sont les
martyrs des temps modernes. Ce sont ces gens qui cherchent désespérément
le sens de leurs vies. Et moi, ouvrier du matin, qu’est-ce que je fais
pour eux? Quelle est la qualité de mon accueil, de mon témoignage de
vie? Sommes-nous devenus des gens qui flattent la brebis grasse sans se
soucier des 99 qui ont quitté la communauté?
Chose
certaine : le Christ provoque les ouvriers de la première heure : il
aurait pu les payer en premier et donner à la fin le même salaire à ceux
qui n’ont travaillé qu’une heure. Personne n’aurait réagi. En commençant
par payer ceux qui ont travaillé moins longtemps, il veut donner une
leçon de vie aux autres. Avons-nous à jalouser ceux qui ont souffert
toute la journée (toute leur vie) tout en demeurant confrontés à leur
réalité d’indésirable?
L’évangile
d’aujourd’hui nous invite à ne jamais juger les autres, à ne pas
mépriser ceux qui en arrachent avec leur bonheur, à toujours agir avec
beaucoup d’amour dans le cœur, même si en apparence l’autre n’a pas
mérité cet amour. Travailler pour le Royaume de Dieu, c’est faire son
bonheur en rendant les gens heureux autour de nous.
Gilles
Baril, prêtre
Unité pastorale Montréal-Nord |
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