Une
petite fille veut dessiner Dieu: elle demande une
feuille blanche à sa mère et ses plus beaux crayons
à colorier, car dit-elle: « je vais faire un dessin
très important ». On lui a dit que Dieu est très
beau. Après quelques essais, elle décide de ne pas
faire son dessin parce que, dit-elle, « je ne ferais
que l’abîmer ». Oui Dieu est un mystère et vouloir
le définir, c’est risquer de l’abîmer.
Dieu-Trinité, c’est une grâce pour nous. Pour
l’expliquer, je pars de la légende de Narcisse. Il
s’agit d’un jeune homme totalement épris de sa
propre beauté.
Il
cherche partout son image, dans les miroirs de son
palais ou dans les miroirs que forme l’eau des
petits lacs. Il peut y retrouver cette beauté,
jusqu’au jour où, passant au bord d’un étang et
voyant se refléter dans l’eau son propre visage
adoré, en voulant le rejoindre, il se précipite dans
l’étang où il périt. Sur son corps, des narcisses se
mirent à fleurir. Cette légende nous montre que
l’Antiquité avait déjà compris la stérilité d’un
amour qui se replie sur lui-même et d’un égoïsme qui
s’idolâtre. Et voici que, pour nous rendre
totalement libres de cet égoïsme, le Christ nous
révèle la divine Trinité. Le grand trésor de
l’Évangile. Le grand secret de l’amour. La
découverte la plus merveilleuse qui soit.
Sachant que Dieu est unique, les croyants étaient
tentés de penser qu’il était un être solitaire qui
passait son éternité, si l’on peut parler ainsi, à
se contempler lui-même, à se louer, à s’admirer, et
à exiger de ses créatures qu’elles aussi le louent
et l’admirent. Dans cette perspective, Dieu pouvait
devenir un cauchemar; Dieu ne pouvait que devenir un
Narcisse à une échelle infinie, un égoïsme qui
s’idolâtre lui-même.
Or
voici que la révélation de La Trinité dissipe pour
toujours ce cauchemar, en nous apprenant que la vie
de Dieu est communion d’amour.
Et
cette vie d’amour qui déborde se transmet jusqu’à
nous. Dieu est amour et charité. On vit Dieu chaque
fois qu’on pose des actes de charité. Dieu est pure
générosité vécue en toute humilité. C’est ce que
nous enseigne le Christ le soir du jeudi saint en
lavant les pieds de ses disciples.
Rencontrer le Christ, ça nous change sans qu’on le
réalise. Le disciple regarde son mentor et essaie de
faire comme lui… ce qui provoque en nous
l’engagement quand notre regard se porte sur le
Christ. Dieu est là où la misère humaine devient une
invitation à l’oubli de soi et au partage. Dieu est
là où la gratuité du cœur est spontané.
Gilles Baril,
prêtre