Chez les premiers chrétiens,
le temps du carême est un temps privilégié pour préparer
les catéchumènes à recevoir le baptême à l’occasion de
la célébration de la veillée pascale. Et nous commençons
avec l’évangile d’aujourd’hui une série de trois
catéchèses sur le baptême. Le texte de la Samaritaine
nous présente Jésus comme la source d’eau vive qui est
un don de Dieu inépuisable.
La semaine prochaine, nous
verrons le Christ-Lumière avec le texte de l’aveugle-né
et dans deux semaines, nous découvrirons le Christ comme
Résurrection et Vie avec la résurrection de Lazare.
Pour l’instant, regardons de
plus près l’épisode de la Samaritaine : une femme va
puiser l’eau au puits comme elle le fait chaque jour.
Elle voit un homme qui se repose près du puits.
Jusqu’ici rien d’extraordinaire. Sauf que la femme va au
puits à midi au lieu de s’y rendre avant le lever du
soleil comme les autres femmes de son village. Puis
l’homme qui se repose est un juif et les Juifs ne
s’adressent pas à des femmes. Il se met même en
situation de dépendance en lui demandant à boire.
La Samaritaine est rejetée
par ses concitoyens : elle vit avec un sixième homme qui
n’est pas son mari. Ça en prend moins que ça dans un
village pour faire jaser tout le monde. Et voilà que la
voleuse de maris se fait offrir l’eau vive, c’est-à-dire
une eau qui n’est pas corrompue par la soif de
domination, par l’appât du gain et du prestige, par le
désir de s’enrichir au détriment des autres, par le
fast-food du spontané et de la facilité.
L’eau vive de la relecture de
nos vies à la Lumière du respect des différences et de
la compréhension des pièges mal surmontés. L’eau vive
des efforts pour repartir à neuf, des dépassements
nourris par l’écoute attentive des émotions. L’eau vive
de la solidarité réconfortante.
C’est ainsi que la
Samaritaine après une relecture en profondeur de sa vie
est à ce point dynamisée qu’elle court dans son village
pour témoigner son expérience de Dieu. Elle est
tellement transformée que tous oublient leurs préjugés
pourtant coriaces pour venir avec elle à la rencontre du
Messie juif. Le feu sacré de la Samaritaine est tel que
même les conflits raciaux n’ont plus d’importance. Et
tous diront après l’avoir entendu : « Nous savons que
c’est vraiment lui le Sauveur du monde ».
Terminons cette réflexion sur
une note d’humour : savez-vous comment faire boire un
âne qui n’a pas soif? Vous pouvez tirer sur l’âne, le
battre, le forcer : il ne bronchera pas. Le seul moyen
de faire boire un âne qui n’a pas soif est de mettre à
ses côtés un autre âne qui a soif. L’âne entêté se
mettra à boire allègrement.
Voilà notre mission (et celle
de la Samaritaine) : donner le goût aux autres d’aller
puiser à la source qui les habite à l’intérieur
d’eux-mêmes : faire le passage du témoignage à
l’intériorité là où l’Esprit les habite et les
transforme pour faire d’eux de nouveaux témoins du
Christ au quotidien.
Gilles Baril, prêtre