Deux
visions : celle d’Abraham s’entretenant avec le Seigneur et celle des
apôtres en prière avec Jésus. La première vision nous invite à
regarder le ciel, la seconde à regarder Jésus et à l’écouter. Commençons
par écouter, nous verrons mieux ensuite, croyez-moi !
Écouter.
S’arrêter. Faire silence. Ce n’est pas toujours facile, surtout dans
notre monde… Le lien entre la prière et la transfiguration demeure
central dans le récit que l’on vient de lire. C’est pour prier que les
disciples se rendent sur la montagne et c’est encore dans la prière
qu’ils ont cette vision extraordinaire. L’expérience est si forte, si
profondément mystérieuse que les mots ne suffiront jamais à la décrire
tellement cela dépasse les disciples. C’est ce qui arrive, lorsque l’on
rencontre Dieu. C’est ce qui arrive, lorsque Dieu nous rencontre.
La prière dispose le cœur à Dieu, elle le dilate, l’élargit et
l’habilite à entendre sa voix et à le reconnaître au milieu des
prophètes. C’est ainsi que Jésus de Nazareth
apparaît tout autre aux yeux des disciples. Pendant un bref instant,
Pierre, Jacques et Jean entrevoient sa gloire. La prière à cette faculté
de changer notre vision des choses et du monde. Elle nous fait voir le
monde à la manière de Dieu. Pourtant, les disciples sont encore loin
d’imaginer la véritable gloire de Jésus, ils sont encore loin de
comprendre tout le mystère qui se manifestera à Pâques, mais, pour
l’heure, cela leur suffit. Ils voudraient même immortaliser cet instant.
Dresser là trois tentes. Plus tard, ils comprendront, plus tard,
ils proclameront.
La vision d’Abraham marque aussi notre histoire. Pour comprendre la portée du texte, il faut
tenir compte qu’Abraham se fait vieux et que Sarah, sa femme, ne lui a
donné aucun enfant jusqu’à maintenant. « Regarde le ciel, et compte les
étoiles, si tu le peux… Vois quelle descendance tu auras ! » La vision
est immense, elle embrasse tout l’univers, immense aussi la promesse,
elle s’étend à l’éternité. « Abraham eut foi dans le Seigneur, et le
Seigneur estima qu’il était juste. »
Ainsi, l’alliance avec Abraham annonce la Nouvelle alliance avec Jésus. Les deux alliances sont complémentaires et
indissolublement unies. À preuve, les témoins qui s’entretiennent avec
Jésus lors de la transfiguration sont justement deux figures de
l’Ancienne alliance : Moïse et Élie. Et pourtant, Jésus demeure
l’unique, le Fils que nous devons écouter :
« Celui-ci est mon Fils, celui que
j’ai choisi, écoutez-le. »
Ajoutons enfin que la transfiguration de Jésus se reproduit sans cesse
dans ce signe qu’il nous a laissé : l’Eucharistie qui est le pain
transfiguré, transformé, manifesté comme le pain d’un monde nouveau, par
l’action de l’Esprit Saint. Nous-mêmes, par notre baptême, sommes
appelés à cette transfiguration. Car, pour reprendre une expression
chère à Paul : « nous sommes citoyens des cieux ; c’est à ce titre que
nous attendons comme sauveur le Seigneur Jésus Christ, lui qui
transformera nos pauvres corps à l’image de son corps glorieux…»
Richard Depairon,
curé-pasteur
Unité pastorale Montréal-Nord |
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