Date |
Jeudi 10 mars
2011:
jeudi
après
les
cendres |
Textes liturgiques du jour |
Dt 30, 15-20 Lc 9, 22-25 |
Auteur |
Jonathan
Guilbault |
Renoncer,
une
affaire
de désir
« Celui
qui veut
marcher
derrière
moi,
qu’il
renonce
à
lui-même,
qu’il
prenne
sa croix
chaque
jour, et
qu’il me
suive. »
À mes
premiers
contacts
avec
cette
parole
dure,
exigeante
de
Jésus,
j’en
faisais
une
interprétation
« orientalisante »,
plus
bouddhiste
que
chrétienne.
C’est-à-dire
que je
m’imaginais
qu’il me
fallait
m’efforcer
de
renoncer
à tous
mes
désirs
sans
exception.
Certains
courants
de
l’hindouisme
et du
bouddhisme,
présentant
le désir
d’être,
le désir
d’affirmer
sa
personnalité,
comme
source
de toute
souffrance,
invitent
leurs
fidèles
à
extirper
jusqu’à
la
racine
ce genre
de
désirs.
Pour
suivre
Jésus,
pensais-je,
je dois
devenir
impassible,
capable
de tout
supporter,
de tout
accueillir
avec une
humeur
égale.
Si mon
interprétation
n’était
pas sans
valeur,
elle
manquait
toutefois
de
justesse.
Bien que
Jésus
ait
soulagé
la
souffrance
de bien
des
gens, il
n’a
encouragé
personne
à
s’exercer
à
l’éviter :
par
toute sa
vie, et
avec une
clarté
éblouissante
sur la
croix,
il nous
a
montré,
au
contraire,
que la
souffrance
pouvait
être
assumée,
prise en
charge.
De même,
Jésus
n’enjoint
pas à
fuir le
désir,
mais à
s’épanouir
dans la
lignée
du désir
le plus
grand :
l’amour.
S’il se
présente
comme la
vie
éternelle,
et qu’il
se donne
à nous
afin que
nous en
héritions,
il bénit
du même
coup
notre
désir de
vivre,
d’être,
de nous
épanouir.
Alors
qu’en
est-il
du
renoncement,
clairement
identifié
par
Jésus,
dans
l’évangile
d’aujourd’hui,
comme
fondamental
et
inévitable ?
En étant
attentifs
aux
verbes
qui
entourent
l’invitation
au
renoncement,
nous
voyons
poindre
la
réponse :
« marche
derrière
moi »,
« prenne
sa
croix »,
« qu’il
me
suive ».
Marcher,
prendre,
suivre.
Renoncer
n’a donc
rien de
passif,
de
statique.
Au
contraire,
renoncer
à
nous-mêmes,
c’est
transgresser
nos
envies
de
confort,
nos
habitudes
qui nous
isolent
sur une
île, qui
nous
enferment
dans un
univers
où
l’autre
entre
difficilement.
C’est
transformer
notre
désir de
dominer,
de nous
affirmer
aux
dépens
des
autres,
en désir
d’être-avec,
et même
en désir
d’être-pour.
Dans
chaque
rencontre
humaine
authentique,
il y a
un pas à
faire
vers
l’autre.
Le plus
souvent,
ce pas
nous
coûte,
nous
rend
vulnérables,
nous
demande
de
prendre
le
risque
d’être
blessés.
Et c’est
pourquoi
c’est
une
illusion
de
croire
que
l’amour
est
possible
sans
souffrance.
Mais
c’est
une
bonne
nouvelle,
au fond,
car ça
signifie
aussi
que
toute
souffrance
assumée
nous
prépare
à mieux
aimer,
avec
plus
d’abandon
et une
fidélité
éprouvée.
Le
carême
est
justement
cette
période
où nous
sommes
invités
à suivre
Jésus au
désert,
à
marcher
dans ses
pas,
pour
renouveler
nos
dispositions
de cœur
à
prendre
résolument
la croix
qui nous
est
échue.
Dans
cette
traversée,
ce n’est
pas la
perspective
d’une
moins
grande
souffrance
qui nous
porte,
mais
l’espérance,
folle
aux yeux
du
monde,
que
notre
désir de
bonheur
y
trouvera
une
occasion
de
s’élargir,
de
s’approfondir,
jusqu’à
ce que
notre
cœur
soit
capable
d’accueillir
le
torrent
de la
vie
divine.
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